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Date de mise à jour 13/05/2017

Hypotonie néonatale : stratégie diagnostique

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I. Desguerre

Service clinique des maladies du développement, Hôpital Necker – Enfants Malades, Paris, France
Correspondance - Adresse e-mail : isabelle.desguerre@nck.aphp.fr
 
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Arbre diagnostique – Commentaires

(1) Une hypotonie néonatale s’inscrit dans un contexte périnatal. On éliminera en premier lieu les causes transitoires d’hypotonie néonatale infectieuses et d’intoxication maternelle. On recherchera durant la grossesse des prises médicamenteuses ou de toxiques, une infection, une fatigabilité musculaire, l’existence d’une hypomobilité fœtale (mains et pieds bots, luxation de hanches), un siège, un retard de croissance intrautérin, des éléments malformatifs.

(2) Dans les hypotonies dites centrales, la motricité spontanée est pauvre mais celle provoquée est présente, souvent anarchique avec disparition des réflexes archaïques. L’existence d’une microcéphalie ou une macrocéphalie, l’absence de contact oculaire sont des arguments pour une cause cérébrale.

(3) Une atteinte dite périphérique est évoquée lors : (a) d’une hypotonie paralytique (motricité spontanée et provoquée très faible, absence de mouvements en dehors du plan du lit) ; (b) de déformations orthopédiques ; (c) d’une amimie et/ou une ophtalmoplégie et d’un ptosis ; (d) de l’abolition des réflexes ostéotendineux, de la présence de fasciculations linguales en faveur d’une atteinte de la corne antérieure ; (e) d’une détresse respiratoire ou d’une absence d’autonomie respiratoire (hypomobilité thoracique en faveur d’une paralysie du diaphragme et des intercostaux, respiration paradoxale en faveur d’une atteinte isolée des intercostaux avec respect du diaphragme).

Les troubles de succion déglutition par contre peuvent se rencontrer dans les deux mécanismes d’atteinte soit par paralysie des muscles de la face et de la déglutition soit par troubles de coordination d’origine centrale en particulier dans les dysfonctions du tronc cérébral.

Les examens de bases sont une imagerie cérébrale (IRM cérébrale et scanner à la recherche de calcifications), un fond d’œil, un électroencéphalogramme, le dosage des créatines kinases. Le bilan métabolique et les examens génétiques seront réalisés en fonction de l’orientation clinique sachant qu’un caryotype est souvent indispensable et que l’analyse pour le syndrome de Prader Willy sera fréquemment demandée. Le bilan d’une atteinte paralytique commencera par l’étude du gène MPK1 (Steinert congénital) et le dosage des anticorps anti-récepteurs à l’acetylcholine d’origine maternelle. L’électromyogramme n’est pas contributif en période néonatale et la biopsie musculaire doit être réalisée en milieu spécialisé, différée de quelques mois sauf si une décision thérapeutique en dépend (poursuite de la réanimation).

(4) Les causes cérébrales et génétiques : 75 % cas

Clastiques vasculaires ou infectieuses anténatale avec des aspects particuliers à l’imagerie cérébrale, une anamnèse compatible. Elles nécessitent un bilan d’embryofœtopathie avec une ponction lombaire avec dosage d’interféron et PCR virale.

Malformatives cérébrales ont des origines variées et nécessitent un bilan exhaustif. Il peut s’agir d’anomalies de la gyration sustentorielles : pachygyrie, polymicrogyrie, lissencéphalie, d’une agénésie du corps calleux, de malformations de la fosse postérieure.

Métaboliques avec soit un intervalle libre de quelques heures ou jours qui doit faire rechercher en urgence une maladie d’intoxication (chromatographie de AA, AO, ammoniémie), soit une hypotonie massive témoignant d’une encéphalopathie sévère avec épilepsie (hyperglycinémie sans cétose, maladie de Menkès, maladie péroxysomale), soit un tableau d’arthrogrypose associée à un anasarque avec une hépato-splénomégalie en faveur d’une mucolipidose.

Médullaires si l’hypotonie prédomine aux membres inférieurs avec un sillon interfessier pathologique, une fossette sacrococcygienne, un globe vésical.

Les maladies neuromusculaires : 25 % des cas

(5) La myotonie de Steinert congénitale (gène MPK1). Des signes anténataux sont quasi constants, pieds ou mains bots, hydramnios, parfois même mort fœtale in utéro. La mère est constamment transmettrices.

(6) Les myopathies congénitales avec une atteinte de la face et des muscles respiratoires qui peut être associés à une hypoplasie pulmonaire. La biopsie musculaire est indispensable et contributive dans environ 50 % des cas en période néonatale en révélant des anomalies structurelles typiques (Nemaline, central core, multiminicore, myotubulaire) soit une dystrophie musculaire congénitale (associée dans la moitié des cas à des anomalies cérébrales).

(7) L’amyotrophie spinale (abolition des réflexes ostéotendineux et fasciculations linguales) de diagnostic aisé par l’étude du gène SMN.

(8) Les syndromes myasthéniques congénitaux d’origine génétique. La fluctuation et la variabilité des troubles doit faire évoquer le diagnostic (déformations articulaires anténatales, ptosis, ophtalmoplégie, troubles bulbaires, malaises). Un test à la prostigmine IV ou per os sur 8 jours réalisé proche d’une réanimation peut aider au diagnostic.

La myasthénie transmise d’origine auto-immune maternelle n’est absolument pas corrélée à la gravité de la myasthénie maternelle (la mère peut être pauci et même asymptomatique). L’amélioration est spontanée sur quelques jours à quelques semaines correspondant au temps d’élimination des anticorps.

Références

Balliu PR, Navarro C. Presentation, clinical course and outcome of the congenital form of myotonic dystrophy. Pediatr Neurol 1994;11:208-13.

Laugel V, Cossée M, Matis J. Diagnostic approach to neonatal hypotonia: retrospective study on 144 neonates. Eur J Pediatr 2008;167:517-23.

Beeson D, Hantaï D, Lochmüller H, et al. 126th International Workshop: congenital myasthenic syndromes, 24-26 September 2004, Naarden, the Netherlands. Neuromuscul Disord 2005;15:498-512.