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Date de mise à jour 14/05/2017

Éosinophilie

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É. Doré

Pédiatrie générale mulidisciplinaire, CHU Estaing, 1 rue Lucie- Aubrac, 63100 Clermont- Ferrand, France
Correspondance - Adresse e-mail : edore@chu-clermontferrand.fr (É. Doré)
 

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Arbre diagnostique – Commentaires

(1) L’hyperéosinophilie ou éosinophilie est définie par un nombre absolu (et non un pourcentage) de polynucléaires éosinophiles sanguins > 500/mm3, confirmé sur plusieurs prélèvements sanguins.

(2) Les causes les plus communes sont :

  • Terrain allergique (éosinophilie toujours inférieure à 1 500/mm3) ;

  • Cause médicamenteuse (intérêt d’un interrogatoire complet) : principalement les β-lactamines, le triméthoprime/sulfaméthoxazole, les antifongiques, les antiépileptiques (notamment : phénobarbital, phénitoïne et carbamazépine) et les AINS ;

  • Les infections parasitaires métropolitaines et d’importation.

(3) Les causes parasitaires sont de deux types :

  • Les parasitoses métropolitaines (gale*, oxyurose*, toxocarose, trichinose, distomatose hépatobiliaire, tænia, echinococcose) ;

  • Les parasitoses d’importation (ou exotiques), avec notamment : filarioses (lymphatique ou de type loase), anguillulose, hydatidose, ascaridiose, schistosomiase et ankylostomiase.

(4) Les étiologies virales sont également à envisager selon le contexte : VIH, hépatite B, hépatite C et HTLV1.

(5) Le syndrome de Churg et Strauss est très rare en pédiatrie (une vingtaine de cas publiés) et associe une éosinophilie, un asthme et des manifestations extra- respiratoires : cutanées, digestives, cardiaques, ostéo-articulaires, neurologiques ou rénales).

(6) La triade de Widal associe asthme, polypose sinusienne et intolérance à l’aspirine, par anomalie du métabolisme de l’acide arachidonique.

(7) Les étiologies dermatologiques sont multiples et facile à identifier : outre l’eczéma, les érythèmes polymorphes, la dermatite herpétiforme, l’épidermolyse bulleuse médicamenteuse et le psoriasis, toutes ces atteintes sont aisément identifiables.

(8) Le DRESS syndrome associe une fièvre, une érythrodermie et des adénopathies (Drug Rash with Eosinophilia and Systemic Symptoms).

(9) La révélation d’une pathologie maligne par une hyperéosinophilie est un mode particulièrement rare. Il s’y associe souvent d’autres signes hématologiques (anémie normochrome normocytaire arégénérative, thrombopénie, anomalies de la leucocytose, etc.) ou extra- hématologiques (adénopathies, hépato- splénomégalie, atteinte cutanée infiltrante, signes douloureux osseux, etc.). Les diagnostics possibles sont : les lymphomes hodgkiniens ou non hodgkiniens, l’histiocytose langerhansienne, la leucémie myéloïde chronique, les leucémies aiguës (notamment la forme myéloïde de type LAM4Eo). Certaines tumeurs solides (notamment cérébrales) s’associent parfois à une éosinophilie, sans que l’origine soit bien claire.

(10) L’aspergillose broncho- pulmonaire allergique repose sur des critères diagnostics stricts : asthme, éosinophilie > 1 000/mm3, IgE sériques totales > 1 000 ng/ml, bronchiectasies proximales, infiltrats pulmonaires et documentation aspergillaire (Prick test, précipitines IgG spécifiques, IgE ou IgG anti-aspergillus fumigatus). Elle est plus fréquente en cas de mucoviscidose ou d’asthme chronique évoluant depuis plus de 5 ans.

(11) Le syndrome hyperéosinophilique idiopathique est très rare. Il est défini par une hyperéosinophilie > 1 500/mm3, évoluant depuis plus de 6 mois, avec bilan étiologique négatif, malgré l’association à des lésions viscérales diverses (cutanées, cardiaques, hépatiques, pulmonaires, neurologiques, rénales, etc.). Le pronostic est péjoratif et nécessite le recours à des traitements immunosuppresseurs lourds (corticothérapie générale, Glivec®, Hydréa®, Vincristine®, etc.). Une série pédiatrique a retrouvé une atteinte cardiaque fréquente (16 cas sur 18 avec morbi- mortalité élevée, par nécrose puis fibrose myocardique).

Liens d’intérêts

L’auteur n’a pas communiqué ses conflits d’intérêts.

 
* Éosinophilie très modérée ou absente.
 
 

Figure 1. Courbe de Lavier.

 

Annexe 1. Exploration d’une éosinophilie.

1) Interrogatoire appliqué

  • Antécédents (atopiques, allergiques, etc.) ;

  • Traitements en cours ;

  • Voyages en zone d’endémie parasitaire ;

  • Mode de découverte et ancienneté des signes.

2) Examen somatique détaillé

  • Signes d’altération de l’état général ;

  • Examen cutanéo- muqueux ;

  • Signes digestifs (diarrhée, prurit anal, douleurs abdominales, rectorragies, etc.) ;

  • Recherche d’atteinte d’organe à intégrer à la démarche étiologique.

3) Bilan de débrouillage

  • Numération formule plaquettaire et réticulocytes ;

  • Ionogramme sanguin avec fonction rénale ;

  • Bilan hépatique ;

  • IgE totales et Prick tests ;

  • Sérologies VIH, hépatites B et C, HTLV1 selon le contexte ;

  • Examen parasitologique des selles 3 jours consécutifs ;

  • Sérologies guidées par la notion de voyage (parasitose exotique).

4) Traitement antiparasitaire d’épreuve (type Albendazole = Zentel®) : si absence d’amélioration, bilans de seconde ligne

  • Anticorps antinucléaires et anti- ADN natifs ;

  • Anticorps antineutrophiles cytoplasmatiques ;

  • Vitamine B12 sérique ;

  • Dosage IgGAM ;

  • Bilan radiologique (radiographie de thorax, échographie abdomino- pelvienne) ;

  • ECG et échocardiographie.

5) En cas de normalité du bilan précédent et de persistance de l’éosinophilie

  • Myélogramme avec examen cytogénétique et cytométrie de flux ;

  • Phénotype lymphocytaire T B NK et étude de clonalité T ;

  • Transcrits de fusion du syndrome hyperéosinophilique (FIP1L1- FDGFRα) ;

  • Analyse histologique des organes atteints (LBA, coloscopie/FOGD avec biopsie digestive guidée, biopsie cutanée, etc.).

Références

Labbe A, Paillard C, Tridon A. Diagnostic d’une éosinophilie. EMC Pédiatrie 2001;4-214-A-10.

Klion A. Hypereosinophilic syndrome: current approach to diagnosis and treatment. Annu Rev Med 2009;60:293-306.

Ustianowski A, Zumla A. Eosinophilia in the returning traveler. Infec Dis Clin North Am 2012;26:781-9.