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Date de mise à jour 14/05/2017

Fuites urinaires de l'enfant

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V. Forin

Unité pédiatrique de médecine physique et de réadaptation, Groupe hospitalier Trousseau – La Roche Guyon,
26 avenue du Docteur Arnold Netter, 75012 Paris, France

 

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Arbre décisionnel – Commentaires

(1) Les fuites urinaires sont le symptôme toujours au premier rang lors d’une consultation pour des troubles mictionnels car gênantes socialement. Les autres principaux signes sont les infec­tions urinaires récidivantes et la rétention stercorale. S’il existe une constipation terminale (fécalomes, douleurs défécatoires et abdominales, encoprésie), une prise en charge est mise en route par lavement colique évacuateur, laxatifs en continu pendant plusieurs semaines puis la situation urinaire est réévaluée.

(2) Le comportement mictionnel est analysé objectivement par un catalogue mictionnel (CM) : c’est le relevé sur deux jours consécutifs passés à la maison des horaires et volumes (en ml) de chaque miction diurne et nocturne. Les fuites sont notées ainsi : 0 = pas de fuite, + = sous-vêtement mouillé, ++ = sous-vêtement et pantalon mouillés. Le CM apprécie la fréquence des mictions (pollakiurie), le volume vésical et l’importance des fuites. L’interrogatoire recherche les urgences mictionnelles, la dysurie et la miction en deux temps, les signes de constipation (défécations rares et douloureuses, encoprésie), les infections urinaires avec et sans fièvre et les épisodes de fièvre non expliqués. L’examen clinique recherche avant tout un encombrement stercoral par la palpation abdominale et le toucher rectal, s’assure de la normalité des organes génitaux externes et de l’examen neurologique et orthopédique (stigmate cutané d’un dysraphisme fermé à type de sillon inter-fessier dévié avec une masse lipomateuse sous cutanée, pied creux, inégalité des membres inférieurs). L’échographie urinaire vérifie la normalité du haut appareil, mesure l’épaisseur de la paroi vésicale et évalue le résidu post-mictionnel (RPM) significatif si supérieur à 20 % du volume de la miction. L’examen cytobactériologique des urines est systématique et interprété selon les critères de Kass (bactériurie > 105 germes/ml et leucocyturie > 20 000/ml) si les conditions de prélèvement et de conservation des urines sont correctes. La valeur du dépistage de l’infection urinaire, par des bandelettes réactives recherchant les nitrites, une leucocyturie et une hématurie, a été étudiée aussi bien chez l’adulte que chez l’enfant. Lorsque les trois tests, voire seulement les deux premiers, sont négatifs, la valeur prédictive néga­tive est proche de 98 %. La valeur prédictive positive est plus faible (65 à 75 %). La négativité des plages leucocytes et nitrites rend l’infection urinaire peu vraisemblable. Par contre, la positivité d’une ou deux plages doit conduire à la réalisation d’un examen cytobactériologique des urines avec antibiogramme.

(3) Les fuites sont diurnes et nocturnes :

  • pollakiurie + urgenturie + infections urinaires basses : hyper­activité vésicale (anciennement vessie « instable » ou « immature ») fonctionnelle ou neurologique. L’hyperactivité vésicale, caractérisée à l’examen urodynamique par des contractions non inhibées du détrusor est identique qu’elle soit d’origine neurologique ou fonctionnelle. La clinique et d’autres signes urodynamiques permettent de faire le diagnostic différentiel.

Le traitement de l’hyperactivité vésicale revient à la suppression des épines irritatives (constipation, infection urinaire, oxyurose, vaginite, toilette correcte du prépuce) et à l’administration d’oxybutinine en plusieurs prises sur la journée.

  • fuites à l’effort et en fin de nuit + RPM à l’échographie vésicale : vidange vésicale incomplète

    •     par obstacle sous-vésical fonctionnel (dyssynergie vésico-sphinctérienne mise en évidence à la débitmétrie avec EMG périnéal par électrodes périnéales collées) ou organique avec une dysurie mise en évidence à la débitmétrie simple (valves de l’urètre postérieur du garçon, urétérocèle). Traitement chirurgical de l’obstacle organique, de rééducation pour l’obstacle fonctionnel, par sondages intermittents lors d’obstacle neurologique.

    •    par hypocontractilité vésicale : vessie neurologique ou « vessie paresseuse » (dysurie à la débitmétrie simple). Traitement : éducation à une miction complète

  • fuites permanentes à miction conservée : abouchement urétéral ectopique de traitement chirurgical.

(4) Les fuites sont uniquement nocturnes, le comportement mictionnel diurne et l’examen clinique sont normaux : énurésie nocturne isolée (ENI). Rechercher :

  • une anomalie de la répartition diurne des boissons à reporter en début de journée si tel est le cas ;

  • une polyurie nocturne (osmolarité urinaire basse sur les urines du matin < 800 mosm/l) ;

  • traitement par analogue structural de l’hormone antidiurétique ;

  • un encombrement du carrefour ORL et des apnées du sommeil facilitant l’ENI.

(5) Les fuites sont uniquement diurnes : clinique et échographie urinaire sont normales. Le CM montre une pollakiurie variable selon les circonstances de vie quotidienne. Réaction au stress.

Références

Cochat P. Enurésie et troubles mictionnels de l’enfant.Elsevier, 1997.

Forin V. Périnéologie infantile. Correspondances en pelvi-périnéologie 2002;2:5-34.

Forin V. Quand demander une exploration urodynamique devant une énurésie ? Réalités Pédiatriques 2000;49:35-6.

Forin V. Prise en charge de l’incontinence urinaire dans l’enfance. Arch Pediatr 2005;12:731-3.

Loening-Baucke V. Urinary incontinence and urinary tract infection and their resolution with treatment of chronic constipation of childhood. Pediatrics 1997;100:228-32.