Orientation et prise en charge thérapeutique
(4) En cas de premier épisode de pancréatite, l’hospitalisation est toujours indiquée.
S’il s’agit d’un nouvel épisode chez un patient connu pour pancréatite récurrente ou chronique, que l’alimentation orale est conservée et que l’antalgie per os est satisfaisante, un retour à domicile peut être proposé.
(5) Une surveillance rapprochée est indispensable, en raison notamment du risque de dégradation secondaire : monitoring de la diurèse, des paramètres hémodynamiques (FC/TA) et respiratoires (FR, SpO2), et de la douleur.
(6) Les patients ayant une forme modérée avec défaillance d’organe (cœur, poumon, rein, foie) ou ayant une forme sévère sont hospitalisés en Unité de Soins Intensifs / Continus ou en Réanimation.
(7) Les apports hydriques initiaux sont à optimiser quelle que soit la gravité de la pancréatite pendant les 24 premières heures afin de prévenir l’évolution vers une forme plus sévère (type pancréatite nécrosante ou défaillance systémique).
Les apports se font par voie orale si bonne tolérance digestive dans les pancréatites légères, ou intraveineuse par du soluté glucosé isotonique (type G5% + 9 g/L (soit 153,9 mmol/L) de NaCl + 2 g/L (soit 26,8 mmol/L) de KCl), balancé, au débit de 1,5 à 2 fois les apports de base.
(8) L’antalgie doit être adaptée à l’intensité de la douleur (selon les recommandations OMS). Les douleurs pancréatiques peuvent être sévères et requérir chez un nombre non négligeable de patients une antalgie de palier 2 voire 3. Les AINS sont autorisés.
Le SIRS peut s’accompagner de fièvre, d’hyperleucocytose et d’une élévation de la CRP. Il est nécessaire de différencier le SIRS d’une infection de pseudokyste ou de nécrose, en se basant sur la clinique (état septique) et une éventuelle identification bactériologique (hémocultures, culture de liquide (pseudokyste) ou de matériel nécrotique obtenu par écho-endoscopie). Ainsi, l’antibiothérapie (ceftriaxone et métronidazole, en 1ère intention) n’est donc pas systématique en cas de fièvre, sa prescription reste à l’appréciation du médecin.
Il n’y a pas d’indication à la prescription systématique d’IPP, ou d’enzymes pancréatiques.
(9) Une réalimentation orale précoce est recommandée, dès que possible et avant 48-72h, quelle que soit la sévérité de la pancréatite, sauf en cas d’iléus (distension abdominale, arrêt du péristaltisme intestinal), après contrôle de la douleur, selon la tolérance. Elle doit être normocalorique. Il n’y a plus de recommandation à un régime sans graisse (hors hypertriglycéridémie). En cas de vomissements, on peut proposer une nutrition entérale continue sur sonde naso-gastrique et sur sonde naso-jéjunale en cas d’échec, après avis spécialisé. En cas d’iléus, une nutrition parentérale sera instaurée jusqu’à reprise du transit.
Pour les patients avec des formes modérées à sévères, on peut d’emblée débuter par une nutrition entérale. On privilégiera un mélange polymérique plutôt que semi-élémentaire, administré prioritairement de façon fractionnée, ou en continu en cas de mauvaise tolérance.
Bilan et traitement étiologiques
(10) Les pancréatites aiguës chez l’enfant sont très majoritairement idiopathiques ou virales, et ne requièrent aucun traitement spécifique. De nombreux agents infectieux (virus, bactéries, parasites, mycoses) peuvent être responsables d’un épisode de PA ; leur recherche peut se discuter, orientée par la clinique et le contexte de survenue.
(11) Si une cause iatrogène est suspectée (l’introduction récente d’un traitement est évocatrice), l’arrêt de ce traitement devra être discuté.
(12) L’hypertriglycéridémie (> 0,5 g/L = facteur de risque ; > 1 g/L = facteur causal), fera l’objet d’un traitement spécifique : perfusion de soluté glucosé, voire plasmaphérèse dans un premier temps, puis régime restreint en graisse, avec supplémentation en Ω3. Pour rappel, l’hypertriglycéridémie est généralement d’origine génétique chez l’enfant.
(13) En cas de lithiase biliaire enclavée, une extraction du calcul est indiquée. Selon les patients (notamment l’âge et le poids) et les compétences disponibles dans l’hôpital où l’enfant est pris en charge, la concertation doit avoir lieu avec les équipes d’endoscopie et de radiologie interventionnelle, afin de discuter de la prise en charge par voie rétrograde par CPRE (Cholangiopancréatographie Rétrograde Endoscopique) ou antérograde percutanée (en radiologie interventionnelle).
(14) En cas de traumatisme pancréatique, la conduite à tenir dépend du grade selon la classification de l’AAST (American Association for the Study of Trauma). Grade I-II : surveillance simple. Grade III, IV et V : avis chirurgical pour discussion concertée de prise en charge (observation ou chirurgie).
(15) La pancréatite auto-immune est extrêmement rare. Le diagnostic doit être évoqué chez des patients présentant un tableau auto-immun ou auto-inflammatoire. La prise en charge est spécialisée, reposant notamment sur un traitement par corticostéroïdes.
Suivi et complications
(16) Un premier épisode de pancréatite aiguë légère peut être pris en charge par les services
d’urgences et de pédiatrie générale. Un avis en gastroentérologie est indiqué en cas de pancréatite
aiguë modérée ou sévère et/ou en cas de récidive (PAR ou PC).
(17) La surveillance au décours d’un épisode de PA est avant tout clinique. Un suivi toutes les 24 à 48h de la lipasémie jusqu’à décroissance est préconisé. En l’absence de majoration de la douleur, de signe d’infection ou de vomissements, le suivi biologique ultérieur sera hebdomadaire jusqu’à normalisation de la lipasémie.
Près de 80% des pancréatites aiguës ont une évolution rapidement favorable. En cas de stagnation oude majoration de la lipasémie dans les jours ou semaines qui suivent le premier épisode, une complication est à rechercher (pseudokyste, fistule, nécrose). Une imagerie par échographie, avec éventuel complément par une cholangioIRM, sera alors utile. Un pseudokyste peut apparaître de quelques jours à 4 semaines après un épisode de PA, et sera drainé s’il est symptomatique (douleur, infection, obstacle à la vidange gastrique, compression portale) ou de grande taille (> 5cm). Le drainage peut se faire par voie trans-gastrique ou percutanée, selon sa localisation.
En cas de PC, une surveillance clinique simple suffit le plus souvent. Les complications à plus long terme des épisodes modérés ou sévères de pancréatite sont : un pseudokyste, une thrombose/anévrysme en intra-abdominal, une dysfonction pancréatique endocrine
et/ou exocrine, justifiant un suivi spécialisé au long cours.
Conclusion
La pancréatite aiguë est une pathologie majoritairement bénigne, mais potentiellement sévère dont la prévalence est en augmentation. Une prise en charge rapide et adaptée, reposant sur un traitement symptomatique et la recherche d’une cause curable, permet de réduire la durée d’hospitalisation ainsi que le nombre d’admissions en réanimation.