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Date de mise à jour 14/05/2017

Allergie aux protéines du lait de vache

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L. Couderc, O. Mouterde, C. Marguet

Unité de pneumo-allergologie et de gastroentérologie pédiatriques, CHU Charles Nicolle, 76031 Rouen, France
Correspondance - Adresse e-mail : laure.couderc@chu-rouen.
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Arbre diagnostique – Commentaires

L’allergie aux protéines de lait de vache (APLV) est la première allergie alimentaire à apparaître chez l’enfant et débute, le plus souvent, chez le nourrisson dans les premiers mois de vie. La chronologie des manifestations permet de différencier deux tableaux cliniques.

Les manifestations immédiates (1) survenant moins de 2 heures après l’ingestion de lait, dont le mécanisme est principalement IgE dépendant. Les signes peuvent être cutanés (urticaire aiguë, angio œdème), digestifs (diarrhée, vomissements) et/ou respiratoires (rhinite, conjonctivite voire crise d’asthme). Une réaction allergique sévère généralisée ou systémique (choc anaphylactique) peut survenir et définit l’anaphylaxie.

Les manifestations retardées (2) sont principalement l’eczéma et les troubles digestifs à type de diarrhée, de régurgitations persistantes, de rectorragies, de prise de poids insuffisante.

Les tests cutanés à lecture immédiate réalisés par prick tests et/ou le dosage des IgE spécifiques aux protéines de lait de vache (PLV) (3) constituent la première étape de l’exploration allergologique. L’extrait allergénique a été retiré du marché et les tests cutanés sont dorénavant effectués à l’aide d’une goutte de lait de vache pur (extrait natif). Certains auteurs ont suggéré une corrélation entre le taux des IgE spécifiques et la réalité de l’APLV. Cependant, selon des recommandations pédiatriques françaises récentes, on ne peut retenir de valeur seuil pour les IgE spécifiques dont la variation est fonction de l’âge de l’enfant au moment du diagnostic et du tableau clinique.

Dans le cas de manifestations retardées, les prick tests et/ou les IgE spécifiques peuvent être négatifs. Devant une symptomatologie digestive chronique et /ou un eczéma résistant au traitement, ces examens seront complétés par un patch-test au lait (4) dont la sensibilité augmente avec l’âge de l’enfant. Pour certaines équipes, ce test prêt à l’emploi et non remboursé appelé Diallertest® est préconisé en première intention dans les réactions retardées. Ce test a une meilleure sensibilité que le patch test classique réalisé avec des Finn Chamber.

Dans le cas de manifestations immédiates, la positivité de ces 2 tests (5) signe une APLV et conduit à la mise en place d’un régime d’éviction pendant au moins 6 mois. Cependant leur négativité ne permet pas d’éliminer formellement le diagnostic d’APLV. Si les tests allergologiques sont négatifs (6), le diagnostic d’APLV ne peut être retenu (8). La persistance des symptômes sous régime alimentaire normal devra faire poser l’indication d’un test de provocation orale qui permettra de diagnostiquer une éventuelle APLV. Dans certains cas d’anaphylaxie grave (7), les tests peuvent être négatifs ; un régime d’éviction sera donc proposé et réévalué à distance.

Si les tests allergologiques sont tous négatifs (9), le diagnostic d’APLV ne peut être retenu et il convient de rechercher une autre cause (10). En l’absence d’autre cause, un régime d’épreuve sans PLV (11) peut malgré tout, être proposé pendant 4 à 6 semaines avec une réintroduction du lait ensuite. De nombreux symptômes digestifs ou extra digestifs non spécifiques peuvent faire évoquer une APLV. Par ailleurs le passage d’un lait usuel à un lait de régime modifie de nombreux paramètres (glucides, lipides, protéines, vidange gastrique, temps de transit…). Ceci explique les fréquents diagnostics par excès d’APLV. Une tentative précoce de réintroduction peut être proposée quand le diagnostic ne paraît pas assuré, en dehors de l’anaphylaxie.

Si un des tests allergologiques est positif (12), un régime d’éviction des PLV (13) sera mis en place.Le régime d’éviction fait appel chez le nourrisson à un hydrolysat poussé de caséine ou de protéines du lactosérum. Hormis au début, dans le cas des formes digestives avec retard de croissance, la présence de triglycérides à chaînes moyennes n’est pas nécessaire. Le lait de soja n’est pas recommandé chez les nourrissons. Dans de rares cas, le régime d’éviction peut être modifié en cas d’allergie avérée aux hydrolysats, avec prescription de mélanges d’acides aminés (Neocate® ouNutramigen AA®). Chez l’enfant diversifié, une consultation de diététique est indispensable avec réévaluation du régime.

Seule l’efficacité du régime évaluée après 4 semaines et une réintroduction des PLV dans un deuxième temps, permettra de porter le diagnostic d’APLV. En revanche si les symptômes cliniques initiaux persistent, il ne s’agit pas d’une APLV.

La chronologie et le type de symptômes présentés par l’enfant guident l’exploration allergologique. L’histoire clinique et les tests allergologiques suffisent le plus souvent pour diagnostiquer une APLV. Cependant, dans certains cas, c’est l’évolution après éviction stricte des PLV, voire le TPO qui apporte la preuve de l’APLV. L’évolution de l’APLV se fait le plus souvent vers la guérison spontanée. Certains enfants, chez qui persiste une APLV, pourront bénéficier d’une induction de tolérance qui nécessite ultérieurement une prise régulière de lait.

Références

Villard-Truc F, Gomez SA, Deschildre A, Rancé F. Test de provocation par voie orale aux aliments chez l’enfant. Quand, pour qui et comment ? Sélection de patients. Rev Fr Allergol Clin 2006;46:610-24

Eigenmann PA. The spectrum of cow’s milk allergy. Pediatr Allergy immunol 2008;18:265-71.

Vandenplas Y, Koletzko S, Isolauri E et al. Guidelines for the diagnosis and management of cow’s milk protein allergy in infants. Arch Dis Child 2007;92:902-8.