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Date de mise à jour 18/05/2018

Gibbosité

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S. Pesenti

Service d’orthopédie Pédiatrique – Hôpital d’Enfants de la Timone, AP-HM, Aix Marseille Université, 264 rue Saint Pierre, 13385 Marseille
Correspondance - Adresse e-mail :  sebastien.pesenti@ap-hm.fr (S. Pesent).

Gibbosité

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Arbre diagnostique – Commentaires

(1) Gibbosité. La gibbosité est définie par la surélévation dans le plan transversal d’un gril costal par rapport à la ligne médiane lors de l’examen en antéflexion du tronc (fig. 1). Elle correspond à la déformation des côtes et de la paroi thoracique due à la déformation rachidienne (rotation vertébrale). C’est un signe pathognomonique de la rotation vertébrale et donc de la scoliose : une gibbosité ne peut pas exister s’il n’y a pas de scoliose et, à l’inverse, un patient scoliotique ne peut pas se présenter sans gibbosité. Si une déformation du tronc existe sans gibbosité, on parle alors d’attitude scoliotique, dont les causes les plus fréquentes sont une inégalité de longueur des membres inférieurs ou une banale hypotonie du tronc chez le petit enfant.

En pratique, sa recherche se fait comme suit : après avoir éventuellement compensé l’obliquité du bassin (cale sous le membre inférieur le plus court), on demande au patient de se pencher vers l’avant en gardant les mains jointes. L’examinateur pourra alors apprécier l’existence et l’importance de la gibbosité (« bosse » paramédiane). La gibbosité peut être quantifiée à l’aide d’un scoliomètre, qui mesure la dénivellation qu’elle occasionne. À noter que l’importance de la gibbosité n’est pas en rapport avec l’importance de la déformation vertébrale (elle est moins marquée en particulier dans les scolioses lombaires). Le reste de l’examen du rachis s’attachera à l’évaluation :

  • de face, de l’équilibre des épaules, de l’asymétrie des plis de la taille et de l’équilibre global du tronc ;

  • de profil, des courbures rachidiennes (dos plat/creux) ou accentuation des courbures physiologiques (hyperlordose/hypercyphose).

 Examen en antéflexion du tronc.

(2) Examen neurologique. L’examen neurologique doit être complet et systématique devant tout patient présentant une scoliose. Il est indispensable car un trouble de la statique rachidienne peut être secondaire à une atteinte neurologique. L’examen des membres inférieurs s’attachera à rechercher un syndrome pyramidal (réflexes rotuliens et achilléens, réflexes cutanéo-plantaires), signant l’atteinte médullaire, et l’existence d’un déficit sensitivomoteur. Les réflexes cutanés abdominaux seront recherchés ; leur abolition fait suspecter une atteinte médullaire (syringomyélie). Enfin, un examen des paires crâniennes sera réalisé

(3) Cas particulier : scoliose tumorale. Les scolioses tumorales sont un cas particulier puisqu’elles se présentent sans gibbosité à l’examen clinique. Cependant, une scoliose avec un aspect radiographique inhabituel (typiquement : convexité thoracique gauche), un petit rayon de courbure ou démontrant une évolution rapide, doit faire suspecter en premier lieu l’existence d’un processus tumoral rachidien. Une imagerie en coupe (TDM ou mieux, IRM) doit être réalisée en urgence pour éliminer un processus malin. Le patient doit être adressé à un centre de référence pour la prise en charge diagnostique et thérapeutique.

(4) Anomalies associées a l’examen clinique de l’enfant de moins de 3 ans. Les déformations rachidiennes chez le petit enfant sont souvent découvertes par les parents. L’examen clinique doit alors s’attacher à rechercher des anomalies associées afin d’orienter le diagnostic. Les scolioses idiopathiques infantiles se présentent sous la forme d’une déviation vertébrale « nue ». À l’inverse, les scolioses malformatives s’inscrivent souvent dans le cadre d’un syndrome poly-malformatif (VACTERL, Goldenhar, etc.). Les malformations cardiaques et uro-vésicales sont fréquemment associées et doivent être recherchées.

(5) Syringomyélie.   La syringomyélie est une cavité intramédullaire développée aux dépens de la substance grise. Cette cavité ne communique qu’exceptionnellement avec le canal épendymaire. Dans 50 % des cas, une malformation de Chiari est associée à la syringomyélie (engagement des amygdales cérébelleuses dans un foramen magnum élargi). La syringomyélie n’a pas toujours de traduction clinique. Cependant, les réflexes cutanés abdominaux sont absents dans 25 % des cas, de façon uni- ou bilatérale. D’où l’intérêt de réaliser un examen neurologique minutieux devant toute scoliose, même d’allure idiopathique.

(6) Scolioses idiopathiques. Par définition, une scoliose est dite idiopathique si aucune cause n’est retrouvée. Elle se présente donc sans autre symptôme que la déviation rachidienne à l’examen clinique. La présence d’un signe clinique inhabituel (déficit neurologique, signe cutané, etc…) doit faire rechercher une scoliose secondaire (dystrophique, malformative, tumorale ou neurologique). Les douleurs rachidiennes sont présentes chez 15 à 20 % des adolescents, leur valeur diagnostique est donc limitée car une scoliose idiopathique de l’enfant et de l’adolescent ne fait pas souffrir. Aussi l’existence de telles douleurs doit faire remettre en cause le diagnostic de scoliose idiopathique et faire rechercher une cause de scoliose secondaire.

Les scolioses idiopathiques sont plus fréquentes chez les filles. On retrouve fréquemment chez ces patientes une notion d’hérédité (mère, tante, etc.). La forme la plus fréquente est une scoliose thoracique à convexité droite. L’évolution est fortement liée à la croissance et à la « poussée pubertaire », qui correspond à un pic d’aggravation de la déformation. Ceci justifie que l’examen clinique recherche les signes du statut pubertaires (règles, pilosité, taille, etc.). C’est donc une période cruciale au cours de laquelle la surveillance doit être accrue de façon à mettre en place un traitement adapté si nécessaire.

Liens d’intérêts

L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêts en relation avec cet article.

Ce Pas à Pas a été validé par la Société française d’orthopédie pédiatrique