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Date de mise à jour 14/05/2017

Acrosyndromes paroxystiques de l'enfant

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B. Bader-­Meuniera, M. Ferneinyb, Ch. Bodemerb

aService d’immunologie pédiatrique, Hôpital Necker-­Enfants malades, 149 rue de Sèvres, 75015 Paris, France
bDermatologie pédiatrique, Hôpital Necker-­ Enfants malades, 149 rue de Sèvres, 75015 Paris, France
*Auteur correspondant - Adresse e-mail : brigitte.bader-meunier@nck.aphp.fr
 
 
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Arbre diagnostique – Commentaires

Les acrosyndromes paroxystiques de l’enfant comportent le phénomène de Raynaud (PR) l’érythermalgie, les engelures et les acroparesthésies. Le diagnostic étiologique d’un acrosyndrome repose essentiellement sur l’anamnèse et un examen clinique complet.

(1) Les points clés pour orienter le diagnostic étiologique sont le caractère paroxystique ou non, l’existence ou non de facteurs déclenchants ou calmants, le caractère douloureux ou non, la présence ou non de changement de couleur locale : aspect érythémateux, cyanique, blanc, la présence ou non de modification de la température locale, l’existence ou non de troubles trophiques, le caractère uni ou bilatéral, l’existence ou non d’anomalie de l’examen clinique, constitutionnelle (notamment atteinte neurologique, retard statural) ou acquis (notamment recherche attentive de signes évocateurs de connectivite, dermatomyosite ou sclérodermie, palpation des pouls périphériques), la recherche de prises médicamenteuses ou de toxiques.

(2) Les acrosyndromes paroxystiques comportent essentiellement le phénomène de Raynaud caractérisé par une décoloration des doigts provoquée par le froid, évoluant typiquement par accès triphasiques : pâleur, cyanose, hyperhémie [1]. Cependant ces accès peuvent être également biphasiques voire monophasiques. Il est primitif dans la grande majorité des cas pédiatriques. La recherche d’une étiologie repose sur l’évaluation clinique, l’étude de la NFS, VS, CRP, la recherche de facteurs anti-­nucléaires (FAN), d’anticorps antiphospholipides (APL) et la réalisation d’une capillaroscopie. En l’absence de prise de toxiques ou de médicaments, d’ulcérations digitales ou d’autres anomalies cliniques (croissance staturo-­pondérale normale, pouls périphériques palpés, absence de manifestations cutanées, muqueuses (aphtes) musculaires, digestives, d’anomalies constitutionnelles, de facteurs anti-­nucléaires à taux significatif, d’anticorps anti-­phospholipides, de syndrome inflammatoire et d’anomalies majeures à la capillaroscopie), le caractère primitif du PR est très probable.

(3) Les engelures se manifestent par des brûlures avec présence de papules érythrocyaniques, et parfois d’œdèmes, de bulles ou de croûtes (30 %) siégeant à la face dorsale des doigts et orteils, des talons, des genoux, des coudes, des oreilles, et du visage. Elles sont typiquement déclenchées par le froid. Dans cette présentation typique, aucun examen complémentaire n’est nécessaire. Leur survenue ou leur persistance durant les mois d’été doit faire rechercher une étiologie associée, notamment un « lupus-­engelure » [2] : NFS, VS, FAN. Au moindre doute, une biopsie cutanée sera réalisée.

(4) L’érythermalgie est un acrosyndrome rare, déclenché par la chaleur et amélioré par le froid. Il se manifeste par la présence d’un érythème très douloureux, avec chaleur et œdème. Il touche essentiellement les pieds, et moins souvent les mains et les oreilles. Il peut être primitif, résultant dans certains cas de mutations du gène SCN9A codant pour la protéine Nav1 constitutive des canaux sodiques, de transmission dominante [3] ; il est alors bilatéral. Il peut également être associé à des contextes augmentant la viscosité sanguine, à un lupus systémique, un syndrome myéloprolifératif ou une prise médicamenteuse ou toxique (intoxication chronique au mercure notamment).

(5) Quelques causes génétiques rares sont à rechercher plus spécifiquement en cas d’anomalies constitutionnelles associées, notamment :

Le syndrome d’Aicardi-­Goutières [4], se manifestant par une encéphalopathie précoce avec spasticité, microcéphalie progressive et calcifications des noyaux gris centraux. Cette atteinte est parfois associée à une fièvre et une hépatosplénomégalie, et une atteinte auto-­immune (cytopénie, lupus) et des pseudo-­engelures ou un PR. L’augmentation de l’interféron adans le LCR est très évocatrice du diagnostic qui sera confirmé par une étude génétique (mutations homozygotes ou hétérozygotes composites de TREX 1, RNASEH2A, RNASEH2B, RNASEH2C et SAMDH1).

La spondylenchondrodysplasie (SPENCD), liée à une mutation du gène codant pour l’enzyme TRAPS (Tartrase-­resistant acid phosphatase), se manifestant par un retard statural lié à une dysplasie osseuse, parfois associée à une atteinte neurologique (diplégie spastique, retard de développement, calcifications des noyaux gris centraux) et une auto-­immunité.

Liens d'intérêts

Les auteurs ont déclaré n'avoir aucun lien d'intérêts en relation avec cet article.

Références

Hisama FM, Dib-­Hajj SD, Waxman SG. SCN9A-­Related Inherited Erythromelalgia. In: Pagon RA, Bird TD, Dolan CR, Stephens K, editors. Seattle (WA), USA: University of Washington, GeneReviews; 1993-­2006.

Nigrovic PA, Fuhlbrigge RC, Sundel RP. Raynaud’s phenomenon in children: a retrospective review of 123 patients. Pediatrics 2003;111(4Pt1):715-­21.

Rice G, Patrick T, Parmar R, et al. Clinical and molecular phenotype of Aicardi-­Goutieres syndrome. Am J Hum Genet 2007 81:713-­25.

Simon TD, Soep JB, Hollister JR. Pernio in pediatrics. Pediatrics 2005;116:e472-­5.