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Date de mise à jour 15/05/2017

Réintroduction des protéines de lait de vache

 

K. Garcette

Centre médical spécialisé de l’enfant et de l’adolescent, 17, rue Froment, 75011 Paris, France
Service de gastro-entérologie et nutrition pédiatriques, hôpital Armand-Trousseau, 75012 Paris, France
Correspondance - Adresse e-mail : k.garcette@cmsea.com (K. Garcette).

 

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Arbre décisionnel – Commentaires

La prise en charge et la réintroduction des protéines de lait de vache (PLV) dépendent des différentes formes cliniques faisant suspecter une allergie aux protéines de lait de vache. On distingue les formes immédiates (1) et les formes retardées (6,10,13).

Les formes immédiates, principalement immunoglobulines E (IgE) médiées, surviennent dans les 2 heures après l’ingestion des PLV. Elles sont le plus souvent cutanées (urticaire, angiooedème) mais aussi respiratoires (asthme-dyspnée, wheezing), oto-rhino-laryngologiques (ORL) (rhino-conjonctivite), digestives (diarrhée, vomissements) et parfois une réaction sévère systémique (anaphylaxie). Dans ce dernier cas – ou si la réaction est typique, évidente (2) – un régime d’éviction des PLV est effectué d’emblée pendant au moins 6 mois (3). Lorsque la réaction est douteuse (4), un bilan est effectué (IgE spécifiques – tests cutanés). En cas de positivité des tests, une éviction est effectuée et en cas de négativité, un test de provocation oral (TPO) en milieu hospitalier est réalisé afin de confirmer ou pas l’allergie aux PLV. Dans les formes immédiates, une première tentative de réintroduction afin de vérifier si la tolérance est acquise est effectuée en milieu hospitalier à partir de l’âge de 1 an et après 6 mois de régime d’éviction (5). De préférence, un dosage des IgE spécifiques (± tests cutanés) est effectué au préalable car leur taux peut avoir une valeur prédictive d’acquisition tolérance (5). Plus le taux IgE est élevé, plus la probabilité d’une persistance de l’allergie est importante. Les valeurs seuil ne sont pas consensuelles et les taux sont à interpréter en fonction de l’âge.

Cependant quelque soit les études des taux d’IgE spécifiques supérieurs à 5 KUa/l à 1 an et à 10 KUa/l à 2 ans semblent être en faveur d’une persistance d’une allergie. Un taux élevé pour la caséine est également en faveur de l’absence d’acquisition de tolérance (si taux supérieur à 3 KUa/l avant 2 ans probabilité > 90 % ). Une décroissance des taux d’IgE de plus de 50 % est un facteur favorable à l’acquisition de tolérance.

Les formes retardées, le plus souvent non IgE médiées, surviennent plusieurs heures à plusieurs jours après l’ingestion des PLV. Les manifestations sont le plus souvent cutanées (eczéma) et digestives. Ces dernières sont diverses avec notamment trois entités cliniques décrites (syndrome d’entérocolite induite par les protéines alimentaires [SEIPA], entéropathie allergique, proctocolite allergique) mais aussi des manifestations moins spécifiques (coliques, constipation, difficultés alimentaires, douleurs abdominales…).

Dans ces formes retardées (6), le dosage des IgE spécifiques et/ ou les tests cutanés n’ont que peu d’intérêt pour le diagnostic car souvent négatifs. Aussi, en dehors des cas plus particuliers de la proctocolite allergique et du SEIPA, le diagnostic repose toujours sur l’épreuve d’éviction-réintroduction. Une éviction des PLV est effectuée pendant 2 à 4 semaines (7). En l’absence d’amélioration des symptômes cliniques, le diagnostic d’allergie aux PLV n’est pas retenu. S’il y a une amélioration, un TPO est effectué (8) (à domicile dans les formes légères à modérées et en milieu hospitalier dans les formes sévères). En cas de positivité lors de cette réintroduction, un régime d’éviction des PLV est effectué pendant au moins 6 mois avec une tentative de réintroduction pouvant être faite à partir de 9-12 mois (9), ces formes guérissant souvent plus vite que les formes immédiates. Cette réintroduction peut être faite au domicile si les manifestations cliniques étaient discrètes à modérées mais il est recommandé de faire auparavant un bilan allergologique (9) car il a été décrit le passage de formes non IgE médiées à des formes IgE médiées. Il n’existe aucun protocole consensuel de réintroduction des protéines de lait de vache au domicile. Celle-ci peut être aussi différente en fonction de l’âge. Elle se fait toujours de manière progressive. L’intervalle d’augmentation des doses est variable tous les 3 jours à toutes les semaines et adapté en fonction des symptômes. L’introduction du lait cuit ( gâteaux par exemple ) pour initier la réintroduction est conseillée car mieux tolérée, mais en fonction de l’âge n’est pas toujours possible. L’introduction de céréales contenant des protéines de lait de vache peut alors être proposée. Puis le lait cru sera progressivement introduit. Chez le nourrisson non diversifié, on conseille de remplacer progressivement une cuillère mesure de sa préparation pour nourrissons sans protéines de lait de vache par une cuillère mesure de préparation pour nourrissons avec protéines de lait de vache.

La proctocolite allergique (10) est caractérisée par la survenue de selles glairo-sanglantes chez un nourrisson en bon état général et ayant une bonne croissance staturo-pondérale pouvant être allaité. Cela survient le plus souvent dans les premières semaines de vie. Dans ce cas, une éviction des PLV chez l’enfant ou chez la mère allaitante (11) permet une amélioration de la symptomatologie, le plus souvent en quelques jours. L’acquisition de la tolérance est le plus souvent précoce, dans la grande majorité des cas à 12 mois mais parfois on constate une acquisition plus précoce. Aussi, il peut être proposé une tentative de réintroduction au domicile à 6 mois (12). Le syndrome d’entérocolite Induite par les Protéines Alimentaires (13) se manifeste par la survenue généralement entre 1 à 4 heures après ingestion des PLV de vomissements itératifs associés à une pâleur et à une léthargie, pouvant parfois être responsable d’un choc hypovolémique (d’où la contreindication et l’inefficacité de l’adrénaline en l’absence de remplissage dans le traitement). Il peut survenir une diarrhée secondairement. En cas de forme typique (14), un TPO n’est pas recommandé et une éviction des PLV est d’emblée effectuée. Parfois, le diagnostic est douteux (15), notamment confondu avec une gastro-entérite en période épidémique. Alors un TPO est indispensable pour confirmer le diagnostic. Il doit être obligatoirement effectué en milieu hospitalier avec nécessité de pose d’une voie d’abord intraveineuse. L’enfant sera surveillé de manière prolongée après la dernière prise en raison de la réaction retardée. En cas d’allergie confirmée, un régime d’éviction sera réalisé pendant au moins 6 mois avec une première tentative de réintroduction plus tardive que dans les autres formes retardées à partir de 12-18 mois (16) car l’acquisition de tolérance est souvent plus tardive. Il est également recommandé d’effectuer un bilan allergologique auparavant en raison du passage de la forme non IgE médiée à la forme IgE médiée. Il existe des formes de SEIPA chronique avec un tableau associant des régurgitations, des vomissements, parfois de la diarrhée, une mauvaise croissance staturo-pondérale. La prise en charge sera identique avec un risque lors de la réintroduction d’un tableau de SEIPA aiguë, d’où les mêmes précautions à prendre lors de celle-ci.

Liens d’intérêts

Au cours des 5 dernières années k Garcette a perçu des honoraires ou financements pour participation à des congrès, actions de formation, participation à des groupes d’expert de la part des laboratoires Blédina, Nutricia, Nestlé, Sodilac, Novalac, MeadJohnson.

Références

Koletzko S, Niggemann B, Arato A et al. Diagnostic approach and management of cow’s milk protein allergy in infants and children : ESPGHAN GI Commitee Practical guidelines. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2012;55:221-9.

Fiocchi A, Brozek J, Schünemann H et al. World Allergy Organization (WAO) Diagnosis and Rationale for Action against Cow’s Milk Allergy (DRACMA) Guidelines. Pediatr Allergy Immunol 2010;21:1-125.

Lifschitz C, Szajwesa H. Cow’s milk allergy : evidence-based diagnosis and management for practitioner. Eur J pediatr 2015;174:141-50. Nowak-Wegrzyn A, Katz Y, Mehr SS et al. Non-IgE-mediated gastrointestinal food allergy. J Allergy Clin Immunol 2015;135:1114-24.