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Date de mise à jour 14/05/2017

Pancréatite aiguë

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M. Bellaïchea,b, O. Mouterdea,c

aGroupe francophone d’hépato-gastroentérologie et nutrition pédiatriques
bService de Gastroentérologie, Mucoviscidose et Nutrition, Hôpital Robert-­Debré, 48 boulevard Sérurier, 75935 Paris cedex 19, France
cUnité de Gastroentérologie Pédiatrique, Hôpital Charles-­Nicolle, 76031 Rouen Cedex, France
Auteur correspondant - Adresse e-mail : bellaichemarc@gmail.com

 

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Arbre diagnostique – Commentaires

Les pancréatites aiguës sont beaucoup plus rares chez l’enfant que chez l’adulte. Le diagnostic est souvent évoqué dès l’examen clinique devant des douleurs violentes épigastriques à irradiation postérieure, contraignant l’enfant à une position antalgique en chien de fusil. Les vomissements sont fréquents voire constants. Le tableau est parfois abâtardi en cas d’immuno-­suppression. Il est capital à l’interrogatoire de demander à la famille s’il y a eu un traumatisme (en particulier chute sur le guidon d’un vélo) ou si l’enfant est sous traitement au long cours. Le contexte infectieux est également important à évaluer.

(1) Définition de la conférence de consensus sur la pancréatite aiguë selon la SNFGE : douleurs épigastriques et élévation de la lipase à plus de 3 fois la normale (l’amylasémie est moins spécifique).

(2) La pancréatite aiguë peut devenir récidivante, puis évoluer avec ou sans intervalle libre vers une pancréatite chronique. La prise en charge des poussées est identique dans les deux cas.

(3) Il n’existe pas d’indice pronostique de gravité clinique validé chez l’enfant. Les indices de Ranson et d’Imrie sont biologiques (sauf l’âge) et uniquement validés chez l’adulte (Tableau 1). Toutefois, une hypertransaminasémie, hyperglycémie, hypocalcémie, acidose, hypotension artérielle, ou une association à des troubles respiratoires peuvent être considérés comme des éléments de pronostic plus réservé.

(4) L’échographie est un examen décisif. Elle n’est pas contributive dans 40 % des cas si surpoids. Elle est indispensable chez l’enfant et permet de surveiller l’évolution de manière non invasive. Le scanner a une sensibilité de 60 à 92 % et une spécificité de 90 %. Le score de Balthazar n’est pas validé chez l’enfant, mais ses items permettent de définir au mieux la pancréatite (Tableau 2). Il faut donc initialement faire les deux examens, puis évaluer le suivi uniquement par échographie si possible.

(5) La recherche génétique doit être la plus exhaustive possible. Test de sueur, étude de PRSS1, SPINK1/PSTI et CFTR, qui sont les gènes impliqués les plus fréquents. Le laboratoire de génétique du CHU de Brest en a l’expertise.

(6) Tout enfant atteint de pancréatite symptomatique doit être hospitalisé.

(7) Dans tous les cas, le traitement étiologique s’il est possible est le pilier thérapeutique.

Le plus souvent (80 %) les pancréatites aiguës sont de sévérité minime et seul un traitement antalgique est à préconiser. Dans les formes modérées la surveillance clinique et biologique doit être rigoureuse. Il est indispensable de lutter contre la douleur selon les paliers OMS (la nalbuphine et la morphine sont souvent nécessaires.) Il est raisonnable de proposer pendant quelques jours, un régime hyper calorique sans excès de graisse. Aucune étude n’a pu permettre d’établir un guide pratique des modalités de nutrition optimale pour les pancréatites. Dans les formes sévères, la prise en charge se fait en unité de réanimation pédiatrique. Aucun traitement spécifique n’a démontré son efficacité. Le traitement est symptomatique avec une assistance nutritionnelle hyper-calorique.

L’analgésie est donc toujours de mise. La sonde naso-gastrique est à mettre en place si vomissements itératifs ou iléus sévère, pour une nutrition entérale dès que possible. Une nutrition parentérale peut être menée initialement, en l’absence d’alimentation orale ou entérale, car il existe un risque de dénutrition. Un antisecrétoire gastrique est souvent prescrit empiriquement, sans conviction(pas d’Evidence-based-medicine). L’octréotide, sandostatine n’ont aucune indication. Le traitement chirurgical ou endoscopique des faux kystes ou des nécroses, ainsi que l’antibiothérapie se discutent lors des formes graves en milieu de soins intensifs.

(8) Enquête étiologique :

  • Traumatisme : 25 % ;

  • Pathologie générale : purpura rhumatoïde, syndrome de Kawasaki, lupus, maladie de Crohn, syndrome de Reye, syndrome hémolytique et urémique, insuffisance rénale chronique, hyperparathyroïdies, hypertriglycéridémie ;

  • Causes toxiques : corticoïdes, acide valproïque, 6 mercaptopurine,mésalazine ;

  • Causes infectieuses : oreillons, coxsakies, Mycoplasma pneumoniae, rougeole, EBV, CMV, Ascaris ;

  • Étiologie malformative (pancréatites chroniques) : canal biliopancréatique commun, sténose du Wirsung, pancréas divisum ;

  • Causes post-­opératoires ;

  • Lithiase biliaire ;

  • Causes génétiques.

Cette liste est non exhaustive. Il est capital de noter que dans 1/3 des cas, aucune cause n’est retrouvée. Parfois, une pancréatite aiguë inaugure une évolution plus chronique.

 

Tableau I. Scores biocliniques spécifiques chez l’adulte (Ranson, Imrie) avec 3 pour valeur seuil.

Score de Ranson (1 point par item)

À l’admission ou au moment du diagnostic :

– Âge > 55 ans

– Globules blancs > 16 g/L

– Glycémie > 11 mmol/L (sauf diabète)

– LDH > 350 U/L (1,5 × N)

– ASAT > 250 U/L (6 × N)

Durant les 48 premières heures :

– Baisse hématocrite > 10 %

– Ascension urée sanguine > 1,8 mmol/L

– Calcémie < 2 mmol/L

– PaO2 < 60 mm Hg

– Déficit en bases > 4 mmol/L

– Séquestration liquidienne estimée > 6 L

Score d’Imrie (1 point par item)

– Âge > 55 ans

– Globules blancs > 15 G/L

– Glycémie > 10 mmol/L (sauf diabète)

– LDH > 600 U/L (3,5 N)

– Urée sanguine > 16 mmol/L

– Calcémie < 2 mmol/L

– PaO2 < 60 mm Hg

– Albuminémie < 32 g/L

– ASAT > 100 U/L (2 × N)

 

 

Tableau II. Score de Balthazar

Chez l’adulte, l’index de sévérité sur la tomodensitométrie, décrit par Balthazar, présente une bonne corrélation avec la morbidité et la mortalité. Il est évalué au mieux à J3. Il est recommandé de le mentionner dans les comptes-­rendus. L’analyse TDM tiendra également compte d’éléments pronostiques non intégrés dans l’index de gravité : ascite, épanchement pleural, siège céphalique de la nécrose, complications des coulées (infection, fistule, pseudo-­anévrysme, thrombose veineuse).

Grade A : Pancréas normal (0 pt)

Grade B : Élargissement focal ou diffus du pancréas (1 pt)

Grade C :
Pancréas hétérogène associé à une densification graisse péri-­pancréatique (2 pts)

Grade D : Coulée péri pancréatique unique (3 pts)

Grade E :
Coulées multiples ou présence de bulles de gaz
au sein d’une coulée (4 pts)

Liens d'intérêts

M. Bellaïche : Conférences : invitations en qualité d’intervenant (Nestlé, Blédina, Picot, Novalac, GSK) ; Conférences : invitations en qualité d’auditeur – frais de déplacement et d’hébergement pris en charge par une entreprise (Nestlé, Blédina, Picot, Novalac, GSK).
O. Mouterde : aucun conflit d’intérêts pour cet article

Références

ANAES. Pancréatite aiguë, conférence de consensus. Gastroenterol Clin Biol 2001; 25 (Suppl. 1).

Lucidi V, Alghisi F, Dall’Oglio L. The etiology of acute recurrent pancreatitis in children: a challenge for pediatricians. Pancreas 2011;40:517-­21.

Nydegger A, Couper RT, Oliver MR. Childhood pancreatitis J Gastroenterol Hepatol 2006;21:499-­509.