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Date de mise à jour 15/05/2017

Palpitations de l’enfant

 

A. Chantepie*, B. Lefort

Cardiopédiatrie, CHU Tours, France Université François-Rabelais de Tours, France
Auteur correspondant - Adresse e-mail : chantepie@med.univ-tours.fr (A. Chantepie).

 

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Arbre décisionnel – Commentaires

(1) Les palpitations sont des sensations de battements cardiaques rapides et/ou irréguliers, ou la perception de battements trop forts (impression que le cœur va sortir de la cage thoracique). Ces épisodes sont souvent trop courts pour réaliser un ECG (électrocardiogramme) afin d’identifier une éventuelle anomalie rythmique. Les causes cardiaques les plus fréquentes sont bénignes : la tachycardie sinusale, la tachycardie supraventriculaire de type jonctionnel, et les extrasystoles (auriculaires plus que ventriculaires).

(2) La première étape de l’enquête étiologique consiste à poser trois questions essentielles : l’enfant a-t-il des antécédents familiaux ou personnels de pathologie cardiaque ? Les palpitations surviennent-elles pendant ou juste après un effort ? Les palpitations sont-elles précédées par une douleur thoracique, ou associées à un malaise ou une syncope ? En cas de réponse positive à l’une de ces questions : avis cardiologique urgent. En effet, les palpitations peuvent être la première manifestation d’un trouble du rythme ventriculaire grave à risque vital.

(3) Le bilan cardiologique comporte au minimum : ECG, échocardiographie, Holter de 24 heures ; et si besoin : test d’effort, imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque, enregistreur implantable, explorations électrophysiologiques et tests pharmacologiques. Les principales anomalies responsables de troubles du rythme ventriculaire grave sont : les canalopathies (QT long, QT court, repolarisation précoce, tachycardie ventriculaire (TV) catécholergique), les myocardiopathies dilatées ou hypertrophiques, les cardiopathies congénitales opérées avec « cicatrice ventriculaire » (comme la Tétralogie de Fallot), les formes « malignes » du syndrome de Wolf Parkinson White (période réfractaire du faisceau de Kent < 250 ms : risque de fibrillation ventriculaire par conduction auriculo-ventriculaire 1/1 d’une fibrillation auriculaire déclenchée par un effort).

(4) Lorsque les palpitations surviennent au repos et ne s’accompagnent pas d’autre symptôme cardiaque ni de pathologie cardiaque connue, la consultation va préciser leurs circonstances de survenue, leur description minutieuse, et leur fréquence. Chez les adolescents, les palpitations au cours d’un accès d’hyperventilation (crise d’angoisse ou de panique) ou lors du passage en orthostatisme (syndrome de tachycardie orthostatique) évoquent en priorité une tachycardie sinusale. Le mode de début et de fin (brusque ou progressif) des palpitations peut orienter vers un trouble du rythme paroxystique ou vers une simple tachycardie sinusale. La durée et la périodicité des palpitations sont à préciser. Cependant l’interrogatoire a ses limites : le jeune enfant n’arrive pas à préciser le caractère brusque ou progressif de l’épisode, sa durée ni sa fréquence. D’autre part, les parents ont rarement le réflexe de compter la fréquence du pouls au moment d’un accès. Une fréquence du pouls inférieure à 130/minute est rarement en rapport avec un trouble du rythme chez l’enfant. La constatation d’une pâleur ou d’une douleur thoracique survenant au cours de l’épisode ou d’une asthénie prolongée après l’arrêt des palpitations s’observe volontiers en cas de tachycardie jonctionnelle paroxystique rapide.

L’examen clinique est en général normal ; il recherche une arythmie, un souffle organique ou une anomalie des bruits du cœur. Il convient de vérifier l’absence d’anémie et d’hyperthyroïdie, et chez les adolescents, l’absence d’usage de produits illicites.

Idéalement, il est souhaitable de réaliser un ECG à tout enfant se plaignant de palpitations. S’il est anormal, une consultation de cardiologie s’impose. Certaines particularités de l’ECG de l’enfant peuvent cependant compliquer son interprétation : ondes T négatives de V1 à V3, bloc de branche droit incomplet, surélévation de ST dans les dérivations précordiales (V3 à V5) notamment.

(5) Au terme de l’examen initial, en cas de palpitations isolées survenant uniquement au repos, il est possible de déterminer la probabilité d’un trouble du rythme paroxystique. L’hypothèse d’un trouble du rythme est faible dans les cas suivants : fréquence du pouls peu élevée (< 130/minute), contexte d’émotivité ou de stress, accès d’hyperventilation associé, survenue lors du passage à la position debout, début et fin progressifs, absence de pâleur ou d’asthénie, ECG normal. À l’inverse, la probabilité d’un trouble du rythme est élevée si les palpitations démarrent brusquement en dehors de tout contexte anxiogène, ou pendant le sommeil, avec une sensation de battements très rapides, « incomptables » au pouls, et s’accompagnent d’une franche pâleur ou d’une sensation de douleur thoracique, et en cas d’ECG anormal.

(6) Lorsque la probabilité d’arythmie cardiaque est estimée comme faible selon les critères cliniques et que l’ECG de base est normal, la poursuite des investigations cardiologiques dépend de la fréquence de survenue des accès de palpitations. Lorsqu’il s’agit d’un premier épisode ou en cas de palpitations très rares (1 à 3 par an), une simple surveillance médicale peut être proposée en demandant à l’enfant et à ses parents de prendre la fréquence du pouls si possible, et de noter les circonstances la durée, le mode de début et de fin, et les signes associés éventuels.

Une récurrence des palpitations élevée (plusieurs épisodes par mois ou par semaine) finit par inquiéter l’enfant et ses parents. Même si les symptômes n’évoquent pas en priorité un trouble du rythme paroxystique, il sera nécessaire de demander un avis cardiologique et de réaliser des examens complémentaires.

(7) La consultation de cardiologie permet de refaire le point des symptômes cliniques et de compléter l’examen par un nouvel ECG de repos, de réaliser une échocardiographie afin de s’assurer de l’absence d’anomalie structurale ou fonctionnelle, et de proposer un enregistrement du rythme cardiaque de 24 heures par Holter. Il a été montré que le Holter de 24 heures n’a pas un bon rapport efficacité/coût sauf dans les rares cas de palpitations quotidiennes ou pluriquotidiennes. D’autres méthodes de diagnostic de troubles du rythme paroxystiques sont possibles ; certaines sont récentes et encore peu répandues en France : Holter de longue durée (48-72 heures), transmission téléphonique de l’ECG et enregistrement ambulatoire de boucles d’ECG en cas d’évènements (certains systèmes sont sans fil ni électrode), plus rarement Holter implantable en principe réservé aux syncopes inexpliquées. En cas de palpitations isolées, les systèmes d’enregistrement de boucles ECG permettent d’identifier une arythmie (tachycardie ou extrasystolie) chez 10 à 15 % des enfants et une tachycardie sinusale chez au moins 25 % d’entre eux.

(8) Les causes cardiaques des palpitations isolées sont représentées par la tachycardie sinusale, la tachycardie supraventriculaire de type Bouveret utilisant une réentrée intranodale ou fasciculaire (Kent du syndrome de Wolf Parkinson White), la tachycardie atriale ectopique, plus rarement le flutter ou la fibrillation auriculaire. Les troubles du rythme ventriculaire sont peu responsables de palpitations isolées ; il s’agit surtout de la tachycardie ventriculaire fasciculaire gauche (dite de Belhassen sensible au vérapamil) et de la tachycardie ventriculaire droite de Gallavardin survenant en salves. Les extrasystoles ventriculaires même très nombreuses ne sont pas ressenties en général par les enfants.

Les palpitations accompagnent souvent les manifestations aiguës d’anxiété comme le syndrome d’hyperventilation, le trouble panique et la spasmophilie. La tachycardie sinusale rapide de ces troubles est ressentie comme un facteur de stress supplémentaire. Le rôle du pédiatre et du cardiologue est de rassurer en expliquant que le rythme est rapide mais normal, et qu’il n’y a pas de danger vital.

Liens d’intérêts

Les auteurs n’ont pas transmis leurs liens d’intérêts.

Références

Bolourchi M, Batras AL. Diagnostic yield of patch ambulatory electrocardiogram in children (from a national registry). Am J Cardiol 2015;115:630-4.

Ginsburg GS, Riddle MA, Davies M. Somatic symptoms in children and adolescents with anxiety disorders. J Am Acad Child Adolesc Psychiatry 2006;45:1179-87.

Saygi M, Ergul Y, Ozyilmaz I, et al. Using a cardiac event recorder in children with potentially arrhythmia-related symptoms. Ann Noninvasive Electrocardiol 2016;21:500-7.

Park MH, de Asmuntis C, Chierchia GB, et al. First experience of monitoring with cardiac event recorder electrocardiography Omron system in childhood population for sporadic potentially arrhythmia-related symptoms. Eurospace 2011;13:1335-9.